Grève des factrices et des facteurs de Thuir : une lutte victorieuse pleine d’espoirs !

mardi 9 juin 2015
par  Sud éducation 66

Sud PTT 66

Tout avait commencé le 26 janvier 2015, au lendemain de la victoire emblématique de Syriza en Grèce qui redonnait un souffle d’espoir au peuple Grec. Fallait-il y voir un signe du destin ? Toujours est-il que personne ne s’imaginait à ce moment-là (et surtout pas La Poste) que les factrices et les facteurs de Thuir soutenu•e•s par les syndicats Sud et Cgt, d’un comité de soutien local, de nombreuses structures associatives, syndicales et politiques, d’usagers de Thuir… allaient lutter farouchement pendant trois mois et gagner au bout du compte face au rouleau compresseur de La DSCC Golfe du Lion.
Oui, la lutte paie…

Après 98 jours d’une lutte acharnée les grévistes ont arraché un report d’un an de la restructuration qui devait se mettre en place en juin 2015 (délocalisations des tournées sur Saint-Génis des Fontaines, Millas et Toulouges), ce qui n’est pas banal dans le contexte actuel où La Poste taille dans le vif au niveau des organisations et de l’emploi.
D’autant plus qu’au travers de ce projet scélérat les grévistes ont remis directement en cause la stratégie et la politique de l’entreprise. Ce qui explique également l’ampleur et la longueur du conflit.
Certains esprits chagrins seront toujours là pour dire « tout ça pour ça ! ». Certes, la revendication initiale qui était le maintien du centre courrier sur Thuir avec ses activités s’éloigne un peu, mais l’année que les grévistes ont devant eux va leur permettre de préparer d’autres actions et initiatives dont les modalités restent à discuter et à finaliser pour réaffirmer le maintien de leur centre courrier.

Rien n’est inéluctable ou écrit d’avance…
Dès le début du conflit les grévistes se sont démené•e•s pour donner une résonance à leur conflit : interpellation des autres postiers du département, du maire de Thuir, de la Présidente du Conseil Général des Pyrénées-Orientales (PO), de La Préfète des PO, de l’inspection du travail, des députés, d’un médiateur, des medias locaux qui ont été informés au jour le jour du conflit (journaux télés, radios, etc.)… sans oublier les nombreuses apparitions le samedi sur le marché de Thuir pour dialoguer avec les usagers qui spontanément et dès le début ont soutenu le mouvement de grève.
Les grévistes de Thuir espéraient également que la grève initiée le 26 janvier 2015 allait gagner les autres centres courrier du département mais seuls Prades, Rivesaltes, Toulouges, Perpignan ont fait 2 ou 3 jours de grève. S’il y avait eu une convergence des luttes plus importante, il n’y aurait pas eu 3 mois de grève à Thuir et de nombreuses revendications exprimées par d’autres sites auraient été certainement satisfaites. Ce n’est que partie remise.
La preuve…
Malgré les provocations, les intimidations, le déni du dialogue social de la directrice de la DSCC pour affaiblir et pourrir le mouvement les grévistes (80% au début, 60%-50% à la fin) ont fait face avec abnégation à tous les écueils et n’ont pas hésité, pour faire respecter le droit de grève, à solliciter un huissier et assigner La Poste au Tribunal pour utilisation illégale de personnels intérimaires sur tout ou partie des activités dévolues aux grévistes.
De fait, lors de la dernière séance de négociation du 30 avril 2015, ces éléments ont contribué à faire infléchir la position jusqu’alors dogmatique de la direction de la Poste. Ainsi, outre le report au 17 mai 2016 de la restructuration, les grévistes ont obtenu :

  • le comblement de 3 postes de facteurs actuellement vacants
  • le maintien des régimes de travail et des emplois correspondants pendant au moins 12 mois à la date de la mise en place du projet pour éviter que les collègues de Thuir subissent le principe de la double peine, c’est-à-dire deux restructurations consécutives
  • le temps de déplacement dans le temps de travail
  • une indemnité exceptionnelle de 150 € pour chaque agent
  • une promotion pour certains collègues
  • la prise en charge par la Poste de 20 jours de grève.

Si les grévistes ont pu, au bout de 98 jours, déboucher sur une telle victoire, c’est grâce au soutien formidable (moral et financier) venu de toute la France ainsi que de Catalogne Sud, sans qui celle-ci n’aurait pu avoir lieu.
Même si à certains moments le doute pouvait s’installer dans les esprits, celui-ci était vite balayé d’un revers de manche par la fougue et la détermination des femmes (sans pour autant minimiser l’action des hommes) qui ont été tout au long de ce conflit l’élément moteur pour maintenir la cohésion du collectif de grévistes.

Oui, en effet rien n’est inéluctable ! À travers cette lutte exemplaire, les grévistes ont porté sur la place publique ce que l’on appelle de manière prosaïque LA LUTTE DES CLASSES, qui comme chacun le sait est de plus en plus d’actualité à La Poste ou dans d’autres secteurs professionnels du privé ou du public.
Les factrices et les facteurs de Thuir en grève ont également démontré dans cette lutte qu’au-delà de leurs revendications légitimes et catégorielles, ils soulevaient également les enjeux de société touchant au maintien et au développement des services publics en zone rurale.

Et après…
Rien ne sera plus jamais comme avant pour les grévistes de Thuir qui ont fait valoir leurs droits et leur dignité et n’ont à aucun moment accepté une quelconque soumission face aux « incontournables » de la direction de la Poste. Le travail a repris le 04 mai dernier mais la mobilisation et la vigilance restent de mise. Cette lutte victorieuse et pleine d’espoirs qui fera certainement date à La Poste dans les PO, et plus largement au niveau national, ne doit pas rester sans lendemain. Bien au contraire, nous devons en tirer collectivement les enseignements pour en faire un levier pour les luttes à venir qui doivent mieux se coordonner et converger pour stopper les orientations destructrices et néfastes que la direction de la Poste déploie sans vergogne dans les territoires au détriment des postiers, des usagers et de la qualité du service.
Afin de remercier les nombreux témoignages de soutien qui se sont exprimés durant ces trois derniers mois, une soirée festive a été organisée par les grévistes et le comité citoyen le samedi 06 juin 2015 à la MJC de Thuir.

Quand les petits se rassemblent, les grands tremblent !