Rentrée 2015

vendredi 2 octobre 2015
par  Sud éducation 66

Patrice Bégnana

Contre-réforme du collège. Dans un an, entrera en vigueur la prétendue réforme du collège. D’ores et déjà, se profilent des “formations” obligatoires dans certaines académies. Loin d’être concernées par la réforme, elles ont parfois pour contenu des notions de base (le numérique, l’enseignement par projet). En réalité, elles visent le formatage des personnels opposés dans leur écrasante majorité, autrement dit à mettre au pas une profession jugée récalcitrante. L’entêtement de la ministre et du gouvernement en général suivis par quelques pédagogues qui s’illusionnent sur les possibilités d’introduire dans ce nouveau cadre des pédagogies alternatives et de syndicats prétendument réformistes qui n’entendent pas la protestation appellent à une poursuite des actions sous toutes les formes possibles pour imposer une école réellement égalitaire et polytechnique.

Éducation ou délation. « Exigence, justice et valeurs de la République » sont les auspices sous lesquelles la ministre de l’Éducation nationale place la rentrée. C’est la raison pour laquelle le gouvernement veut faire de chacun des personnels des délateurs. En effet, le projet de loi sur les « droits des étrangers » autorise les préfectures à recueillir d’autorité auprès des établissements scolaires des informations pour instruire l’examen de leur dossier, établissements qui seront sommés de les livrer. Quelle relation de confiance peut-on mettre en œuvre dans de telles conditions ? Bref, un ministère de la délation nationale, tel est l’idéal républicain qui nous est proposé.

Précarité. La désaffection d’un métier qui ne fait plus rêver malgré le chômage de masse, les entourloupes d’un gouvernement qui confond stagiaires et postes d’enseignants pour masquer le non-recrutement et la hausse démographique impliquent de pallier le manque de personnels titulaires par des précaires. Ceux-ci augmentent dans la fonction publique (actuellement il y a 900 000 précaires sur les 5,4 millions de fonctionnaires dans les trois fonctions publiques dont plusieurs dizaines de milliers sans contrat de travail, c’est-à-dire en toute illégalité) et dans l’éducation en particulier. Quelques-uns des précaires finissent par avoir un CDI qui les rend corvéables à merci en termes d’affectation, sans compter un salaire dérisoire. C’est pourquoi Sud éducation maintient sa revendication de titularisation sans conditions (concours, nationalité, etc.) des précaires à qui l’État confie des enfants en les payant encore plus mal que les personnels titulaires.

Nouveau statut des personnels. Ils entrent en vigueur pour tous cette année. Rappelons que le décret a instauré un nombre de tâches impossible à faire dans un temps de travail raisonnable. Le gouvernement qui supprime le latin et le grec espère que bientôt plus personne ne se rappellera que le pédagogue était chez les Grecs l’esclave qui accompagnait les enfants à l’école : voilà à quoi il vise à réduire l’enseignement.

Salaires. La politique du gouvernement est efficace sur un point : les salaires des fonctionnaires ont baissé notamment grâce à un plus grand recours aux précaires. Un candidat de droite à la présidentielle préconise-t-il d’augmenter de 10 % le salaire des professeurs des écoles – promesse d’opposant certes – il déclenche lors de la conférence de rentrée le rire méprisant de la ministre. La messe est dite.

PPCR. Sous ce sigle barbare (Parcours Professionnels Carrières Rémunérations) se cache la politique salariale du gouvernement. Une petite augmentation pour les débuts de carrière et les fins de carrières de quelques dizaines d’euros très largement compensée par un allongement pour tous des délais de passage d’échelon et surtout par le maintien du gel du point d’indice jusqu’en 2020. On a pu évaluer à 40 % la perte du pouvoir d’achat des personnels d’éducation depuis 1981. Peut-on dignement accepter ce protocole assorti d’un chantage fait aux organisations syndicales de signer pour pouvoir suivre sa réalisation ? Notre réponse à Sud éducation est non. Une autre politique des salaires, égalitaire, d’augmentation pour tous, ne pourra voir le jour que par la lutte.

Céret. Le lycée de Céret (voir l’article) a vu ses effectifs augmenter, donc il a perdu des postes de vie scolaire selon l’implacable logique de la hiérarchie. Les personnels ont lutté, ont fait grève, nous ont rappelés à l’exigence de nous opposer à cette lente dégradation de nos conditions de travail qui est une destruction concertée du service public d’éducation.

La rentrée 2015 se présente sous les pires auspices. Dans le privé, le code du travail, y compris sa jurisprudence, qui protège déjà peu les salariés, est attaqué. Le ministre de l’économie propose la suppression du statut de fonctionnaire, non pas pour unifier tous les salariés par le haut dans quelque nouveau statut qui rompt avec l’économie de marché néolibérale, mais pour généraliser la précarité de la masse de salariés afin de les rendre dociles à l’exploitation de l’oligarchie qui concentre les pouvoirs économiques, médiatiques, culturels et politique. Pendant ce temps, notre ministère continue sa politique de destruction. Il est toujours d’actualité d’inverser le rapport de forces, à commencer par le 8 octobre.