Par Sodara Kim

L’Education Nationale est un navire dont le capitaine donne des grands coups de hache dans la coque tout en proposant des cours de natation gratuits à 3% des passagers. Un exemple ? le Lycée Maillol de Perpignan.

En juin 2008, ce lycée a été désigné volontaire pour être LE « lycée de la réussite » dans les P.O. (avec 200 autres bahuts en France). Ce bidule, qui consiste à organiser des stages de soutien pendant les vacances pour une minorité avec les moyens retirés à la majorité, a largement été rejeté par les enseignants qui avaient vu 10 postes disparaître à la rentrée. Basé sur le volontariat pour les profs, ce dispositif a été imposé aux personnels TOS, traités pour l’occasion comme des sous-personnels, et sans aucune défiscalisation par ailleurs appliquée aux profs.

Au retour des vacances le bilan éducatif et comptable était assez consternant : sur les 170 élèves inscrits (le lycée en compte 1800) la moitié a préféré, attitude saugrenue en période de vacances, rester chez eux ou venir à la carte. L’absence de transport scolaire excluait de toutes façons les élèves qui en dépendaient. D’après la FCPE, les « prestations » allaient du cours particulier à la garderie. En dehors des rares profs (3 du lycée, 3 d’ailleurs), les onze intervenants de niveau Master 2 ont été « recrutés » sur un coup de téléphone à l’université.

Médiatiquement, le bilan est pourtant positif pour le ministère. Au moins quatre organes de presse locaux et nationaux ont relayé la propagande officielle récitée par le chef d’établissement : « cours particuliers gratuits pendant les vacances ».

Ces produits « tête de gondole » plongent nos élèves dans la logique de la jungle du marché en prétendant les en préserver. Le Ministre clame qu’il s’occupe des plus fragiles alors qu’il organise les conditions de leur échec toute l’année. Par exemple, les effectifs en langue en seconde sont passés de 20 à 35 élèves par classe. La gestion de ce coup de pub s’est faite sur du temps et de l’énergie qui auraient dû être consacrés a l’administration du Lycée déjà passablement ralentie par les suppressions de personnel administratif et de vie scolaire.

De tout cela, l’actualité amnésique et boulimique n’a que faire. Le « Lycée de la réussite » est effectivement la réussite d’un coup médiatique qui au quotidien divise les personnels, les parents, entérine l’idée que les élèves sont en concurrence les uns avec les autres et que les solutions ne sont plus collectives mais individualistes et inspirées d’entreprises dont le profit est l’unique projet pédagogique. L’idée de prendre de l’argent au public pour faire comme le privé nous prépare gentiment aux « chèques éducation », solution miracle prônée par de grands penseurs de l’éducation et de la modernité que sont Milton Friedman, Margaret Thatcher, Philippe de Villiers et Jean-Marie Le Pen.

Croire que le capitaine de ce navire qui s’auto-saborde est fou serait une erreur. Entouré de bons conseillers en « com » et d’administrateurs-liquidateurs dociles, il fait cap vers l’Eldorado de la privatisation pour rejoindre ses copains du « LA POSTE », du « LA SANTE ». Quand le bateau « EDUCATION NATIONALE » aura sombré, les 97% de passagers fautifs car ils n’auront pas été aux pseudo cours de natation pourtant tellement « gratuits » seront secourus s’ils ont les moyens de se payer une bouée, vendue par… les amis du capitaine. Pas fou le gars.